Ce que tout le monde sait, c’est qu’Alain Ducasse est aujourd’hui et depuis longtemps le chef le plus étoilé au monde.
Ce que la plupart d’entre nous ignorent en revanche, c’est qu’il est à la tête d’un groupe qui compte 2000 collaborateurs, qu’il existe depuis 1999 l’école (les écoles) Alain Ducasse, à Meudon mais également en Inde, en Thaïlande et aux Philippines, écoles dans lesquelles sont formés ‘mieux et plus vite’ de futurs cuisiniers venus du monde entier. Car Alain Ducasse cherche toujours à faire mieux et aime aller vite !
Ce que nous ignorons encore, c’est qu’Alain Ducasse est également auteur, éditeur, et toujours pionnier : son premier menu végétarien a plus de 35 ans, il suit de très près aujourd’hui toutes les ressources inattendues que nous apportent et nous apporteront les mers et océans ; qu’il partage volontiers tout ce qu’il a appris ; qu’on trouve sa cuisine sur Terre, sur mer et aussi dans l’espace ! Qu’il est très engagé sur les questions de durabililité, sur le manger bien et pas cher, ce depuis très longtemps.
Sans doute hypermnésique et sans nul doute doté d’une immense capacité de travail, d’une curiosité infinie, d’une très grande générosité, et d’une créativité folle, Alain Ducasse est notre invité et nous mesurons notre chance.
MERCI INFINIMENT ALAIN DUCASSE !
Racontez-nous votre école en quelques mots ?
C’était une école de village avec une petite et une grande classe. Nous étions 40/50 élèves du CP au CM2. Dans la cour, nous avions un préau et de jolis chênes qui servaient d’habitation à de jolis capricornes.
Nous jouions beaucoup au basket.
Nous avions également une cantinière qui s’appelait Charlotte. Elle cuisinait très bien. Il y avait un petit potager dans lequel elle prenait les légumes qui serviraient à nos déjeuners. Les paysans du coin vendaient des poulets, de la viande à l’école.
L’école était tout en bois, avec un parquet, un tableau à l’ancienne qui se fermait. Le plafond était haut, la classe spacieuse. Le maître avait écrit la leçon au tableau avant que nous arrivions et l’ouvrait lorsque la classe commençait.
Les bureaux étaient ‘à l’ancienne’ également avec des assises intégrées et un casier dont nous soulevions le ‘couvercle’. Le maître préparait lui-même l’encre violette que nous utilisions et la versait dans l’encrier en porcelaine blanche intégré à ces fameux bureaux. Nous écrivions à la plume.
Ensuite, c’est le collège, moins joli, dans la commune d’à côté et la cantine bien moins bonne.
Etiez-vous un élève heureux et pourquoi ?
Oui parce que je venais à l’école en vélo chaque matin. Elle était à 2/3 km de la ferme de mes parents. J’étais heureux car c’était la campagne, j’étais libre de venir et de repartir de l’école seul.
J’avais un seul bon copain, il s’appelait Alain également.
En revanche, le maître était très sévère. Il nous avait, Alain et moi, pris en grippe, et nous punissait dès qu’il le pouvait. Nous étions plutôt indisciplinés et peu dociles mais j’en conserve un sentiment d’injustice. Cela ne m’a pas traumatisé mais je m’en souviens.
Pendant les récréations et pour nous punir, le maître nous mettait à genoux. Je me souviens d’un coup de pied que j’avais anticipé et donc esquivé – je m’étais assis sur les talons en m’agenouillant – et le maître avait donc donné son coup de pied dans le mur.
Je me souviens aussi que pour nous venger de sa mauvaise humeur envers nous, nous avions jeté de l’encre sur sa blouse grise toute propre lorsqu’il écrivait au tableau. La classe avait beaucoup ri.
Et puis je m’ennuyais en classe, je trouvais que cela n’allait pas assez vite.
Un(e) enseignant(e) qui vous a marqué(e), pour quelle raison ?
Ce maître, à cause de son injustice.
Un souvenir d’écolière en particulier ? Une anecdote ?
Ce fameux maître nous avait dit que les deux personnes avec lesquelles dans toute sa carrière, il n’avait rien pu faire et qui ne feraient rien, c’était les deux Alain. Mon ami Alain s’est suicidé à 30 ans. Pour ma part, j’avais confiance en moi, mes parents m’encourageaient. De l’importance du caractère sans doute mais aussi de l’environnement dans la faculté à surmonter et réussir.
Et en bonus, une recommandation de sortie, d’atelier ou d’activité pour petits et grands ? (restaurant, musée, exposition, concert, bénévolat...) ?
Le Jardin d’Acclimatation avec ses ateliers, la fondation Louis Vuitton juste à côté, le restaurant Le Frank. Et aussi les Jardins Albert Khan car je suis fan du Japon.